Terre sans maître, Yann Appery -Grasset
Étrange roman que celui-ci.
Un jeune homme, Ilya, pénètre dans un village frappé d’un silence pesant. Pourtant, il poursuivra sa route pour tenter d’atteindre “le mur”, dressé comme une mémoire fossilisée d’un passé dont on découvrira la sombre réalité par touches successives.
Après avoir traversé des paysages âpres et inhospitaliers, poursuivi par un homme dont on ignore la motivation, ses pas vont le conduire jusque un vieux manoir. Du salon où une fête se déroule surgissent des discours aux accents terrifiants. A l’étage il retrouve Tilda, une femme, rencontrée au village. De cette double confrontation, les hommes vociférant du salon et cette femme à la beauté étrange, renaît le souvenir tragique d’un passé innommable.
C’est dans le salon qu’il fera face aux adeptes d’une aryanisation du monde. Dans le silence glacial, sa parole se fige et il fuit.
D’une écriture où le dialogue est quasiment exclu, le roman se déploie comme une rêverie troublée par la quête du souvenir vague et incertain mais à la douleur toujours présente . D’où un climat d’étrangeté où le lecteur se perd et se retrouve à travers un kaléidoscope qui fait apparaître dans le miroitements renaissant du souvenir l’angoisse du passé, comme celle d’un avenir incertain .
Il y a là une respiration où l’écriture invite le lecteur à combler les non-dits du récit.
D’une démarche narrative très intériorisée, le roman d’Yann Appery a une lenteur introspective convaincante.
Niurka Règle