Bien connu des services de police
Bien connu des services de police, Dominique Manotti, Gallimard Folio Policier
Lire ce roman ne relève pas de la tranquillité. Il vous happe littéralement et s’il nous dérange, on poursuit la lecture comme pour ausculter jusqu’au bout ce monde noir, très noir.
Bien sûr c’est un polar ancré dans une double réalité sociale, celle de la police, celle du monde périphérique. Nous sommes à Panteuil, une banlieue virtuelle, proche de la capitale : un centre-ville ouvrier, un centre commercial, des zones d’immeubles blafards, une zone manouche, une zone malienne, des friches et enfin, un commissariat.
Pas facile pour les deux jeunes recrues qui débutent : faire vite, parer au plus pressé, obéir, pas le temps de comprendre, surtout ne pas s’apitoyer car le Ministère de l’Intérieur veut du chiffre. La commissaire Le Muir y veille car elle vise haut, les élections approchent. La police, les politiciens font bon ménage, petits arrangements entre amis.
Il y a pourtant des grains de sable, prêts à compromettre et la commissaire et quelques uns du commissariat dont on a pu masquer les bavures. Et puis, notre jeune policier a surpris un curieux manège du côté du garage « Vertu » sans parler du parking souterrain où les flics font la pluie et le beau temps face aux filles venues de l’Est.
Il y aussi les perdants, pas toujours clairs mais englués dans une ghettoïsation morbide.
Ce qui frappe le lecteur c’est la connaissance non dénaturée et de la police et de la banlieue, comme une sorte de couple qui existe par l’autre dans un jeu du chat et de la souris sans appel. Les scènes ont une certaine force cinématographique avec un regard qui pointe l’essentiel dans une obscurité omniprésente tout le long du récit.
Peu d’ouverture possible et si Noria des R_G., courageuse et intuitive, tente de casser la machine infernale elle est finalement renvoyée à elle-même et au renoncement.
Le texte est servi par une écriture qui ne bafouille pas, une écriture trempée dans l’encre noire du réel. C’est un polar. Un vrai. Et c’est inquiétant.
Niurka Règle