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Pourquoi pas ? Le blog de Niurka R.
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18 avril 2020

Coronavirus : traitement médiatique

 

covid19-4744742

Bonjour, 

Ce billet pointe quelques aspects du traitement médiatique de la crise sanitaire. Les travers habituels des médias de masse n'ont évidemment pas disparu, comme lors de visite de Macron à l'hôpital de Bicêtre où des applaudissements en sa présence ont été largement diffusés, mais pas le discours très critique d'une infirmière syndiquée CGT qui les précédait...

https://www.liberation.fr/checknews/2020/04/12/les-soignants-de-l-hopital-bicetre-ont-ils-applaudi-emmanuel-macron_1784998)

... ou lorsqu'un discours de classe flagrant ne traite pas les joggeurs parisiens et les jeunes du 93 dans les mêmes termes quand il s'agit de parler de (non)respect du confinement (voir le montage d'articles du Parisien twitté par Fatima Benomar, en pièce jointe). 
Mais la situation inédite entrainée par l'épidémie est l'occasion de développements particuliers dont nous donnons quelques aperçus, avec l'aide des veilleurs d'Acrimed et d'Arrêts sur images.  

1. Par temps d'union sacrée, la parole gouvernementale ne se discute pas

On a l'habitude que les médias de masse, en particulier les JT du service public, se fassent le relais de la parole gouvernementale. Mais, même réduite, l'opposition obtient généralement quelques secondes d'antenne... Sur la gestion de l'épidémie, il semble exclu de questionner les discours et décisions du pouvoir, alors même que des mensonges de l'Etat ont été mis en évidence, sur la gestion des stocks de masques notamment.
Ainsi la médecin télévisuelle de FR5 Marina Carrère d'Encausse n'hésite-t-elle pas à défendre un mensonge du gouvernement, par un autre qu'elle prend complètement à son compte, dans un "on" ahurissant de complicité : 

"il faut bien reconnaitre qu'on a dit que les masques n'étaient pas utiles parce qu'on n'en avait pas assez... alors on a priorisé, on a tout fait pour les réserver à ceux qui en avaient le plus besoin, c'est à dire au personnel soignant.
- On a menti sciemment alors ? 
- Sciemment, mais c'était pour une bonne cause, puisque c'était pour protéger la population et le personnel soignant"
Sur Europe 1 le 01/04/20 ; comme l'explique pour Arrêts sur images le médecin Christian Lehman, c'est un "mensonge dans un mensonge, ce n'était pas pour les réserver aux soignants puisque les stocks étaient vides, il n'y avait rien" - publication accessible sur abonnement - https://www.arretsurimages.net/emissions/arret-sur-images/ce-qui-nous-arrive-un-medecin-rembobine)

Un délit aussi flagrant de complicité de mensonge n'est pas le cas le plus fréquent, deux autres moyens sont largement illustrés par le JT de FR2 au lendemain de l'allocution macronienne du 13/04, où la propagande se fait un peu plus discrète. Il suffit par exemple de choisir des propos de scientifiques qui "confirment" les affirmations présidentielles, même les plus sujettes à polémique : l'affirmation de Macron selon laquelle "tester tout le monde n'aurait pas de sens" se voit illico "confirmée" (mot employé par la présentatrice) par un épidémiologiste interrogé par France 2, alors que le dépistage massif est préconisé par de nombreux scientifiques 

(par exemple : https://www.humanite.fr/les-risques-de-rebond-de-lepidemie-sont-gigantesques-alerte-lepidemiologiste-catherine-hill-inserm

et qu'il est pratiqué dans plusieurs pays pour éviter le confinement (comme en Corée du sud ou en Islande) ou accompagner une sortie du confinement (comme en Allemagne).

https://www.lalibre.be/international/europe/comment-l-islande-a-battu-le-reste-du-monde-pour-le-depistage-du-coronavirus-5e9692c87b50a63c37b1c4c2?fbclid=IwAR3KEG7BoCHNqCo2AqRKj3FtuCxnlAIIcZGAonzc2vv5RRQQeDHCjwTvonM#.Xpa4R9wCJ-o.facebook-) 

L'omission ou le silence face aux affirmations gouvernementales est un autre moyen efficace de servir de relais aux discours officiels : ainsi Jean-Michel Blanquer peut tranquillement affirmer ce même 14/04 qu'il prépare la réouverture des écoles pour mi-mai en concertation avec les autres pays européens, alors que la majorité des Etats ont annoncé que cette réouverture n'aurait pas lieu avant septembre... cette "originalité" française n'est à aucun moment soulevée dans le journal, les questions posées au ministre relevant toutes de  la demande d'informations pratiques sur le comment de la reprise, et aucune ne questionnant les motifs de cette décision, très précipitée par comparaison avec les pays voisins, comme si le rôle de la télé publique était de jouer l'assistance du service client du gouvernement. 
Bref, par temps d'union sacrée, la télé publique fait front derrière le chef de "guerre"...

2. Course à l'actu et "raoultisation" de la science 

Les connaissances scientifiques sur le virus sont très incomplètes, les études sont en cours et... prennent du temps. Un temps dont la recherche du buzz quotidien est incapable de se satisfaire. Approximations, erreurs et emballement autour de buzz repris des réseaux sociaux sont alors la règle pour de nombreux médias...

Quel sérieux accorder, toujours au JT de FR2, quand la rédaction est par exemple capable d'afficher doctement qu'1,5 million de personnes qui "auraient" été contaminées représentent 9% de la population française ?  https://www.acrimed.org/Nombre-de-contamines-Covid-19-les-infox-Lapix-au

Autre phénomène notable, le succès accordé aux déclarations fracassantes d'un médecin connu pour ses provocations, qui affirme avoir trouvé le remède miracle mais être victime d'une cabale - voilà les ingrédients capables de nourrir la machine à buzz... dans le contexte sanitaire inédit que nous vivons, les médias de masse ne se donnent pas pour rôle d'apporter des éclairages, de faire le tri entre ce qu'on sait et ce qu'on ne sait pas, mais des résultats présentés sur youtube sont mis sur le même plan que des articles évalués par la communauté scientifique, et intronisent les politiques qui les commentent au rang d'infectiologues... qu'importe que le flou règne entre fake news et information, pourvu que la machine à spectacle tourne à plein. 

(Sur la "médecine-spectacle", voir par exemple http://m.lamarseillaise.fr/analyses-de-la-redaction/decryptage/81603-damien-barraud-medecin-reanimateur-a-metz-thionville-c-est-de-la-medecine-spectacle-ce-n-est-pas-de-la-science?fbclid=IwAR2nTZ6AtPvSG9_ZOMGqyyb51vTSnRpn_YT7PxHhgRLGhSDdNfq7gCTQgAE)

3. Les médias, acteurs puissants d'un modèle économique à sauver

En raison des fermetures des commerces et de l'arrêt de nombreuses activités, la baisse des revenus publicitaires pour la télévision, la radio et la presse serait de 70 % sur avril. Afin de soutenir les médias et d’inciter les entreprises à communiquer quand même, Aurore Bergé, rapporteure LREM du projet de loi sur l’audiovisuel, propose de créer un crédit d’impôt sur les dépenses des annonceurs, car, dit-elle, il faut "faire de la comm’ pendant les moments de crise pour qu’au moment de la sortie de crise, les consommateurs soient au rendez-vous" ! On croit rêver devant tant d'absurdités. 
TF1, où à longueur d'antenne le poids de l'Etat et des charges est vilipendé, n'a donc aucune vergogne à revendiquer l'aide publique en situation de crise... Plus de détails sur cette affaire dans un communiqué de Résistance à l'agression publicitaire publié sur le site d'acrimed : https://www.acrimed.org/Credit-d-impot-sur-les-depenses-des-annonceurs

 

 

 

 

 

 

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