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15 décembre 2011

Conférence de Durban

 

Le fonds "vert" de l'ONU va-t-il partir en fumée?

 

 

Article paru dans  l'Humanité dimanche n°289 du 1er au 7 décembre 2011

 

Après l'échec lamentable des négociations de Copenhague et de Cancun sur le climat, le principal enjeu de la conférence de Durban est la mise en oeuvre d'un fonds « vert » dont la création fut décidée en 2009 au Danemark et confirmée en 2010 au Mexique. Pour les Nations unies, l'objectif est de collecter d'ici 2020 un montant de 100 milliards de dollars, en mettant à contribution le public (les États) et le privé.

 

Officiellement, ce fonds doit permettre de financer des technologies « sobres en carbone » et des mesures d'adaptation au changement climatique dans les pays du Sud. Officieusement, il s'agit de faciliter l'entrée de capitaux privés dans ces pays et de les diriger vers les projets les plus rentables. L'association écologiste Les amis de la terre rappelle le bilan des investissements réalisés entre 2008 et 2010 au travers des mécanismes de la finance carbone : 63 % des fonds vont directement aux multinationales du Nord implantées dans les pays pauvres, et seulement 16 % bénéficient aux entreprises locales. Tout indique qu'il en sera de même pour le fonds « vert ».

 

Les États les plus puissants et l'Union européenne ont donné le ton. En septembre 2011, les ministres des finances du G20 publiaient un document stratégique sur le fonds « vert ». Le 4 octobre, c'était au tour du Conseil des affaires économiques et financières de l'Union européenne (ECOFIN). Alors que la crise économique ne fait qu'empirer, il n'est pas neutre que ces deux institutions travaillent sur le sujet et expriment peu ou prou les mêmes positions : il faut créer un « cadre incitatif pour les investissements privés », accorder une large place aux mécanismes de marché, tout en prenant en compte les contraintes budgétaires des États qui imposent « d'élargir les financements privés ».

 

En coulisses, les multinationales orientent les négociations sans se soucier du politiquement correct. Ces derniers mois, les Nations unies ont reçu deux contributions des acteurs du marché carbone. On y apprend que leur objectif est avant tout de développer les énergies renouvelables dans les pays du sud, les projets de réduction des consommations d'énergie (pourtant bien plus « écologiques ») ne générant pas assez de revenus pour les investisseurs. Pour ce faire, ils réclament que le fonds « vert » finance la couverture du risque pris par le privé dans des États où la situation politique et économique est incertaine. En d'autres termes, socialiser les risques et privatiser les profits...

 

Mais si l'idée de « sécuriser les investissements » fait consensus, l'engouement pour les énergies renouvelables n'est pas partagé par tous. C'est même une guerre ouverte qui a éclaté entre l'industrie des technologies « vertes » et l'industrie des énergies fossiles. Alors que les premiers voudraient voir les subventions à l'exploitation pétrolière, gazière ou charbonnière réorientées vers le solaire ou l'éolien, les seconds réclament des aides pour mettre en œuvre des technologies comme le stockage souterrain du carbone, qui permettrait de rendre l'extraction et la combustion des énergies fossiles « faiblement émettrice de gaz à effet de serre ». A la veille de l'ouverture de la conférence de Durban, les États-Unis et l'Arabie saoudite font monter la pression en refusant de signer le document projet sur le fonds « vert ».

 

Ces débats sont révélateurs. En cette période de crise, les États riches annoncent qu'ils ne débourseront pas un centime qui ne profite directement à leurs investisseurs. Leur objectif est de consolider un ordre économique mondial qui relève ni plus ni moins du néo-colonialisme économique. Fondé sur la libre-circulation des capitaux et des marchandises (le libre-échange) et la soumission des pays pauvres aux « lois du marché », notamment pour l'exportation des matières premières, cet ordre pourrait être renforcé par les accords sur le climat, avec l'alibi de la protection de l'environnement. Reste à savoir qui, des multinationales « fossiles » ou des multinationales « vertes », en sortira le mieux placé.

Aurélien Bernier

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