On a gagné des batailles, d'autres sont possibles...
Le journal Fakir est un journal papier, en vente chez tous Il ne peut réaliser des enquêtes, des reportages, que parce qu'il est acheté.
«La réforme est déjà passée au Sénat… De toute façon, on ne nous écoute pas… Qu’est-ce qu’on y peut?»
Un parfum de résignation flotte, souvent, sur les esprits. Comme si,
malgré les mobilisations des cheminots, des raffineries, des
enseignants, des lycéens, et maintenant des routiers, nous étions
condamnés à la défaite. Or, c’est l’inverse qui est vrai : on gagne
(presque) toujours à la fin… à condition de se bouger le cul !
1906: Le repos hebdomadaire
« Ce n’est pas possible ! »
– proclamait à l’époque le patronat
(sur le même air qu’aujourd’hui pour les retraites, la Sécu, la
taxation des capitaux, etc.). Mais des grèves dures éclatent, cette
année-là, dans le Nord. A Paris, les agents des Postes se mettent en
grève.
Le ministre révoque d’office les grévistes ! Vient le 1er mai. La jeune
CGT a annoncé qu’elle ferait de ce jour-là, un « 1er mai pas comme les
autres » et a décidé de canaliser tout l’effort syndical vers une seule
revendication : la journée de huit heures. A Paris, la peur est extrême.
Les bourgeois achètent des conserves, et s’enferment chez eux. Les
capitaux s’enfuient. Clémenceau, chef du gouvernement, reçoit les
dirigeants de la CGT et les prévient qu’il sera impitoyable. 45000
hommes de troupe sont massés à Paris. Le secrétaire général de la CGT
est, préventivement, arrêté et inculpé ! Le 1er mai se passe sans
trouble important – mais de nombreuses grèves prolongent l’arrêt de
travail. Les ouvriers n’obtiendront pas les quarante heures… mais y
gagneront la loi du 13 juillet 1906 qui rend obligatoire le repos
hebdomadaire. Merci à eux !
1936: Les quarante heures par semaine
« Ce n’est pas possible ! »
- proclamait à l’époque le
patronat. Et cette mesure, pas plus que les congés payés, ne figurait
dans le programme du Front Populaire. Mais juste après la victoire dans
les urnes de la gauche, des grèves éclatent dans des usines d'aviation
du Havre. Le 11 mai, 600 ouvriers et 250 employés des usines Breguet
arrêtent le travail pour demander la réintégration de deux militants
licenciés pour avoir fait grève le 1er mai. L’usine est occupée et les
tentatives de la police de déloger les grévistes échouent. En deux
jours, ces derniers obtiennent satisfaction. Le 13 mai, c’est au tour
des usines Latécoère, à Toulouse, puis le 14 à celles de Bloch, à
Courbevoie, d’être occupées. Le mouvement se répand comme une trainée de
poudre, atteignant rapidement les entreprises voisines, puis toute la
France ! Même la droite, bousculée, effrayée, votera alors, au
Parlement, pour les congés payés et les quarante heures – réclamés par
les ouvriers. Merci à eux !
1945: La Sécu, les retraites, la SNCF, EDF
« Ce n’est pas possible »
– proclamait à l’époque le patronat.
Mais les Résistants sortaient des maquis avec des fusils, leurs esprits
étaient également armés – tandis que les patrons avaient collaboré avec
les Allemands. En six mois, malgré l’hostilité des sociétés
d’assurances, de l’Ordre des médecins, le ministre Ambroise Croizat,
soutenu par les militants – via des pétitions, des réunions, des menaces
de grève – a imposé une révolution sociale en France : ensemble, ils
ont bâti toutes les institutions qui, jusqu’ici, ont préservé les vieux,
les malades, les veuves, de la pauvreté. Merci à eux !
2006: Retirer le Contrat Première Embauche
« ce n’est pas possible »
– proclamait à l’époque le patronat. Ou plus exactement, dans la bouche de Laurence Parisot : «
Il n’est pas raisonnable d’exiger un retrait du CPE. Ce dispositif a
été voté par la représentation nationale. Je crois que cette logique de
rapport de force, n’est pas une logique très constructive. » Eh
bien, ils l’ont ravalé, leur projet de sous-contrat pour les jeunes -
grâce aux mobilisations des étudiants, aidés par les salariés. Merci à
eux !
L’histoire en témoigne : les cheminots tout seuls ne gagnent pas. Les
infirmières toutes seules ne gagnent pas. Les étudiants tout seuls ne
gagnent pas. Les enseignants-chercheurs tout seuls ne gagnent pas, etc.
Tous unis, en revanche, ils gagnent à chaque fois : les conditions de la
victoire sont aujourd’hui réunies. On va leur mettre une raclée !
Cet article est issu d'un tract écrit et distribué par l'équipe de
Fakir (et quelques camarades) lors de la manifestation du 19 octobre à
Amiens. On manquait donc de place pour Mai 68, les conquêtes des années
70 (couverture chômage, par exemple), 1986 et la loi Devaquet, décembre
1995, etc.
(exclusivité édition électronique)