Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Pourquoi pas ? Le blog de Niurka R.
Pourquoi pas ? Le blog de Niurka R.
Archives
Derniers commentaires
Newsletter
26 mars 2009

Le pétrole au coeur de la Françafrique

images


Un litre d'essence, un litre de sang
!


Le pétrole au coeur de la Françafrique

Les bénéfices cumulés des cinq plus grandes sociétés pétrolières mondiales (ExxonMobil, BP,
Shell, Total et Chevron) ont dépassé les 100 milliards de dollars en 2005, un record historique.
Parallèlement, face à la flambée du prix de l'essence, le ministre de l'économie, Thierry Breton,
somme les compagnies pétrolières de se comporter en “entreprises citoyennes” (Le Monde,
10/09/2005). Entreprises citoyennes ?! Bel hommage du vice à la vertu, quand on connaît le
comportement des multinationales du pétrole, notamment en Afrique. Là-bas, l'or noir n'est pas
seulement synonyme de pollution, il rime aussi avec guerre, misère et corruption.
Déclaré “intérêt stratégique national” par les États-Unis en 2003, le pétrole africain est un
enjeu convoité. Avec seulement 7% des réserves mondiales, l'Afrique génère plus de 10% de la
production mondiale de brut, un pourcentage en constante augmentation.1 Au cours des cinq
dernières années, les découvertes de nouveaux gisements ont dépassé celles de toutes les autres
régions du monde ! Principaux producteurs : le Nigéria (30% de l'offre africaine), l'Algérie, la Lybie
et l'Angola. Principaux intéressés : les groupes pétroliers occidentaux, qui se partagent l'or noir
africain depuis les années 60. En France, 20% des importations de pétrole proviennent d'Afrique,
près de 15% aux États-Unis.2 “L'ultradeep offshore” -forage à plus de 1500m de profondeur-
constitue le nouvel Eldorado, spécialement dans le golfe de Guinée. Cette zone représente déjà
35% des activités amont de Chevron Texaco, 30 % de celles de Total et 15 % de celles de Shell.
Dans quelques années, le golfe de Guinée produira plus de barils de pétrole par jour que l’Arabie
saoudite !

L'exploitation du pétrole génère d'immenses mannes financières. La population africaine en
profite-t-elle ? Nullement. L'exemple du Nigéria est emblématique. Premier producteur du
continent, ce pays produit plus de 2 millions de barils par jour, un jackpot quotidien de plus de 60
millions de dollars. Pourtant, en 2004, les indices de pauvreté du Nigéria étaient supérieurs de
30% à ceux de 19803. Même situation en Angola : malgré des revenus pétroliers estimés entre 3 et
5 milliards de dollars par an, l'espérance de vie est de 45 ans, 40% des enfants de moins de cinq
ans sont sous-alimentés, les trois quarts de la population vivent avec moins d'un dollar par jour.
Constat comparable au Gabon, au Congo-Brazzaville, en Algérie, tous grands producteurs
de pétrole : d'un côté, une population sous-alimentée, sans accès aux soins, sans protection
sociale, en grande partie analphabète ; de l'autre, les ingénieurs et cadres occidentaux de Chevron
ou Total, grassement payés, vivent dans des villas protégées, roulent en 4x4, envoient leurs
employées de maison (noires) faire les courses dans des supermarchés spécialement conçus pour
les riches. Et que dire du nouvel oléoduc de 1070 km qui relie les gisements du Tchad et le port
camerounais de Kribi, pour le plus grand bonheur d'Exxon Mobil et de Chevron Texacos ? Afin de
construire cet oléoduc, l'un des plus gros investissements privés en Afrique (2,2 milliards de
dollars), des villages entiers ont été vidés de leurs habitants sans programmes de relogement, de
nombreux agriculteurs n'ont quasiment pas été dédommagés de la perte de leurs terres. Sans
parler des conséquences écologiques de ce grand “projet de développement”...

Comment en est-on arrivé-là ?

En 1998, le livre La Françafrique délivre des clés de compréhension et lance un ''pavé dans
la marée noire''4. Menée par l'association SURVIE5, cette vaste enquête sur les relations France-
Afrique démontre notamment par quels mécanismes l'argent du pétrole africain alimente les
comptes en banque des dictateurs locaux,  de leurs parrains politiciens occidentaux,
d'intermédiaires financiers en tout genre, et, bien sûr, des compagnies pétrolières.
L'affaire Elf et le scandale de l'Angolagate ont fortement contribué à dévoiler les arcanes de
l'exploitation pétrolière. En 1994 éclate l'affaire Elf : c'est le début de dix ans de procédures au
cours desquelles on découvre qu'Elf a été créé en 1967 pour servir de prolongement politique à
l'action de la France en Afrique. Cette entreprise jouait un rôle central dans le financement et
l'organisation d'actions secrètes pour renverser des régimes qualifiés hostiles, ou bien renforcer
des dictatures alignées sur les intérêts français. Elle abritait plusieurs centaines d'agents secrets,
entretenait des sociétés de mercenaires, participait à l'organisation de coups d’État. Les
enquêteurs ont notamment retrouvé dans les coffres de la Tour Elf, à Paris, les traces écrites de
l’organisation de l’un d’entre eux, prévu au Congo-Brazzaville en 1997. Via les paradis fiscaux, Elf
a organisé le drainage d'énormes marges occultes sur l’exploitation de l’or noir africain :
production non déclarée au large des côtes, surfacturation des investissements, arnaques sur le
préfinancement des productions futures, commissions occultes, etc.6

En 1998, c'est au tour de l'Angolagate de défrayer la chronique : là encore, des groupes
pétroliers (BP-Amoco, TotalFinaElf, Exxon...) sont au coeur d'une vaste affaire de trafic d'armes, de
corruption et de pillage du pétrole sur fond de guerre civile7. Cette affaire, toujours en cours, a déjà
éclaboussé des personnalités politiques telles que Jean-Christophe Mitterrand, Charles Pasqua ou
Jacques Attali, mais aussi des intermédiaires financiers tels que Arcadi Gaydamak, Pierre Falcone
ou encore Jean-Charles Marchiani, tous rompus aux trafics d'armes et aux paradis fiscaux.8
Ces deux scandales sont-ils des exceptions ? Ils ressemblent plutôt à la partie émergée de
l'iceberg. Moteur de la croissance occidentale, l'exploitation du pétrole en Afrique repose sur
l'asservissement de toute une population.

Face à tout ce que nous venons de décrire, que faire ? D'abord, ne pas nuire. Les actes
individuels sont indispensables, et possibles, tant les alternatives au pétrole sont nombreuses.
Rouler à vélo, consommer des produits locaux, arrêter le gaspillage d'énergie et d'objets... Les
groupes pétroliers ne seraient rien sans les allées et venues au supermarché, la consommation de
gadgets en plastique, l'auto-boulot-dodo, les vacances en avion ! La simplicité volontaire n'est pas
seulement un acte écologique, elle est aussi un engagement humaniste.

Mais, minoritaire, cette perspective de décroissance a des effets limités : nous devons être
plus nombreux et nous rassembler ! La question est donc également politique : propager ces
informations, organiser des actions symboliques, porter appui aux résistances africaines... Des
luttes collectives sont à rejoindre, soutenir ou imaginer.

http://www.les-renseignements-genereux.org/textes/8929

Publicité
Publicité
Commentaires
Publicité
Pourquoi pas ? Le blog de Niurka R.
  • Le blog s'ouvre sur les questions touchant à l'évolution mondiale intégrant diverses contributions : l''art, la littérature, et de façon générale, la culture qui interprètent le monde et font partie de ma façon d'appréhender le fait humain.
  • Accueil du blog
  • Créer un blog avec CanalBlog
Publicité